L’UNIVERS DES CARTES DU MONDE
La Carte du Monde, planisphère, ou encore mappemonde, est un objet qui fait partie de notre quotidien. Pour se repérer sur plan et retrouver sa route, pour apprendre la géographie, pour décorer ou encore voyager et rêver, la carte du monde est polyvalente et peut remplir de nombreux rôles. On se souvient sans doute des Cartes de notre enfance, pédagogiques et colorées, avec lesquelles nous découvrions la géographie, les pays et leurs capitales.
Aujourd’hui, la Carte du Monde constitue un objet universel. En effet, qui ne reconnait pas le monde avec la forme caractéristique de ses continents et territoires? Qui ne situe pas son pays, sa ville ou le trajet de ses anciens voyages face à un planisphère? Qui ne rêve pas d’aller ici ou là-bas lorsqu’on pose les yeux sur une Mappemonde? La Carte du Monde est un objet qui parle à tous, quelles que soient sa nationalité ou ses origines. Quels que soient ses envies, ses passions ou ses rêves.
Mais comme tout objet existant, la Carte du Monde possède sa propre histoire avec ses propres rebondissements. Elle est née entre les mains de plusieurs hommes de talent, puis elle a évolué, et elle a régressé pour connaître une nouvelle naissance. Elle a parfois été bien différente de celle que l’on connait aujourd’hui.
Les Projections
De ses péripéties, sont nées de nombreux types de cartes, aussi différentes les unes des autres, mais qui se rassemblent autour d’un but commun : représenter le monde de la manière la plus réaliste qui soit.
Leur Histoire
La Carte du Monde s’est transformée au gré des évènements historiques et de l’émergence de nouveaux savoirs. Nous vous proposons de découvrir son odyssée captivante de la Préhistoire à nos jours.
Les Navigateurs
Enfin, partez en mer avec les navigateurs d’autrefois dans le but de comprendre la façon dont ils naviguaient avec les moyens qu’ils possédaient, et suivez l’évolution des techniques au fil du temps.
Le Saviez-Vous ?
La Mappemonde
Même si le terme Mappemonde est maintenant couramment utilisé pour désigner toute carte du monde actuelle, il désignait à l’origine les cartes du monde imaginé plat, réalisées en Europe durant le Moyen-Âge. Toutes les véritables mappemondes (ou mappa mundi) que l’on possède actuellement représentent une vision du monde archaïque, avec des distances souvent fausses ou imprécises. Aujourd’hui, 1 100 mappa mundi nous viennent du Moyen-Âge.
La Rose des Vents
Les premières Roses de Vents n’indiquaient pas quatre directions, mais huit! Les Roses de Vents au Moyen-Âge indiquaient l’est en haut afin de pouvoir placer Jérusalem, la ville sainte, à un niveau supérieur.
LES PROJECTIONS
Un peu de vocabulaire de la Cartographie
Le Globe terrestre est une maquette de la Terre, c’est-à-dire une représentation réelle et fidèle en 3D de notre planète en taille réduite.
Le Planisphère, comme son nom l’indique, est une carte du Globe Terrestre en projection plane, ce qui déforme la réalité car représenter à plat la surface d’une sphère est simplement impossible. D’autant qu’il ne faut pas oublier que notre planète n’est pas complétement sphérique, mais s’apparente plutôt à une ellipsoïde ! On l’aura compris, par définition, un planisphère, ou ce qu’on appelle plus communément une carte, est faux. Les différents types de cartes existants à ce jour sont donc tous nés avec le souci de se rapprocher le plus fidèlement possible de la géographie complexe de notre planète.
La Projection cartographique : pour réaliser un Planisphère, c’est-à-dire une ‘’retranscription’’ du Globe Terrestre sur une surface plane, il faut réaliser ce que l’on appelle une projection cartographique. Cela consiste à appliquer une formule mathématique à chaque point de notre globe localisé par sa latitude φ et sa longitude λ, ce qui lui fournira un nouvel emplacement sur un plan défini par son abscisse x et son ordonnée y. Mathématiquement, ça donne :
x = f1(φ , λ) et y = f2(φ , λ)
Passons les mathématiques ! Penchons-nous plutôt sur les différentes projections cartographiques qui ont jalonnées l’histoire de la Carte du Monde.
Les projections cartographiques terrestres des plus classiques aux plus extravagantes
Note : La liste des projections qui suit ne se veut pas exhaustive. Nous avons choisi de présenter les plus remarquables et sélectionné des projections aussi différentes les unes des autres que possible afin de rendre compte de la diversité des modèles et de l’ingéniosité des hommes qui les ont imaginées. Quasiment toutes les projections possèdent des variantes ou des améliorations qui portent leurs propres noms (il en existe plus de 200 !). Nous n’avons pas jugé judicieux de les présenter par souci de clarté et de lisibilité pour le lecteur, notre but n’étant pas un exposé hautement technique, mais une introduction pédagogique et agréable aux projections cartographiques.
Les projections de Mercator, Gall-Peters et Mollweide
Commençons par la plus connue, et sans doute la plus esthétique, en tout cas la plus commune : la projection de Mercator, du nom de son inventeur Gérard Mercator. C’est une projection cylindrique qui conserve les angles, d’où sa grande utilité pour les navigateurs qui pouvaient tracer leurs lignes de cap facilement lorsqu’ils étaient en mer. Une telle contrainte sur les angles, aussi pratique soit-elle, entraîne une déformation des distances, donc des aires, et par conséquent des proportions entre les continents.
Il existe plusieurs variantes de la projection de Mercator, les différences se portent sur l’espacement des parallèles. En réalité, les Cartes du Monde les plus communément vues de nos jours, ne correspondent pas exactement à celle de Mercator, mais plutôt à ses variantes qui minimisent les déformations des continents aux pôles : on peut citer la projection équirectangualire de Marin de Tyr, la projection stéréographique de Gall, et la projection cylindrique de Miller, par exemple. Elles possèdent cependant la même caractéristique qui est de défomer les surperficies relatives.
Mercator
1569
Cylindrique
Conforme
C’est pour remédier à la déformation de Mercator et de ses variantes qui, pour citer un exemple, donnent à l’Afrique une taille amoindrie par rapport à la réalité, que James Gall suivi de Arno Peters, proposèrent leur propre projection cylindrique qui conserve les superficies relatives : la projection de Gall-Peters. Il s’agit d’un compromis puisqu’à l’inverse, elle ne préserve pas les angles ce qui rend les continents difformes et par conséquent moins esthétiques.
Gall-Peters
1855
Cylindrique
Equivalente
La projection de Mollweide aussi appelée projection de Babinet, est une autre façon de conserver les surfaces relatives en projetant, mais toujours au détriment des angles. Cette projection assez connue est fréquemment utilisée pour les planisphères en raison de son caractère compact. Elle est qualifiée de pseudo-cylindrique.
Mollweide
1805
Pseudo-Cylindrique
Equivalente
Note : Pour comprendre les qualificatifs des projections (cylindrique, conforme, équivalente, etc.), rendez-vous un peu plus loin sur cette page, dans la section La Classification des Projections Cartographiques.
Globe terrestre
Mercator
Gall-Peters
Mollweide
La projection de Goode
La projection de Goode pseudo-cylindrique a été proposée par John Paul Goode en tant qu’alternative à la projection de Mercator. En effet, il s’agit d’une découpe ingénieuse du globe qui peut paraitre grossière au premier abord en s’apparentant à une ‘’peau d’orange épluchée’’, mais qui a l’avantage de beaucoup plus respecter les superficies relatives que la Mercator, au même titre que la Gall-Peters.
Goode
1923
Pseudo-Cylindrique
Equivalente
Projection de Goode
La projection de Postel projette chaque point du globe de manière circulaire sur un plan avec pour centre le Pôle Nord en respectant les distances entres les méridiens. On trouve notamment l’une des utilisations connues de cette projection dans l’emblème de l’ONU.
Postel
1580
Azimutale
Equidistante
Emblème de l’ONU
Projection de Postel
Pratiquement délaissée aujourd’hui, la projection de Cassini, est construite de la même façon que la projection cylindrique de Mercator, à la différence qu’elle est transverse. Ce qui signifie que le globe a été renversé de 90° lors de l’opération de projection. Le résultat est que l’équateur de la cylindrique de Mercator prend la place de la méridienne centrale dans la Cassini et vice versa. En schéma, ça donne :
Cassini
1745
Cylindrique
Conforme
Comparaison entre Mercator et Cassini
La Cassini est couramment présentée dans ce sens
La projection d’Albers est dite conique. Ainsi que plusieurs autres projections précédentes, elle possède la force de conserver les superficies relatives. Actuellement, elle est la projection officielle dans 2 provinces de l’ouest du Canada : la Colombie-Britannique et le Yukon.
Albers
1805
Conique
Equivalente
Projection d’Albers
Les projections de Bonne, Sanson-Flamsteed et Werner
Une autre projection existante consiste à tracer les parallèles du globe comme étant des cercles concentriques et équidistants, le long desquels l’échelle reste constante et est égale à celle d’un méridien d’origine donné. C’est la projection de Bonne. Deux paramètres peuvent varier : le fameux méridien d’origine qui est placé au centre sur la projection, et la parallèle d’origine dont le rayon de courbure est conservé. Les cas limites de ces paramètres fournissent des projections particulières de la Bonne et possèdent leurs propres noms :
La projection de Sanson-Flamsteed: la parallèle d’origine est l’équateur.
La projection de Werner: la parallèle d’origine est un pôle.
Bonne
1780
x
x
Projection de Bonne
Méridien d’origine = 0° (méridien de Greenwich), Parallèle d’origine = 45°
Projection de Sanson-Flamsteed
Méridien d’origine = 0° (méridien de Greenwich), Parallèle d’origine = 0° (équateur)
Projection de Werner
Méridien d’origine = 0° (méridien de Greenwich), Parallèle d’origine = 90° (pôle)
La projection de Fuller
La projection de Fuller quant à elle, inventée par Richard Buckminster Fuller en 1946, repose sur une technique ingénieuse : on fait l’approximation d’une terre icosaédrique, c’est-à-dire un polyèdre à 20 faces. Il est alors facile de représenter la terre sur une surface plane en dépliant le patron de l’icosaèdre. Ainsi, les surfaces relatives et les formes des continents sont quasiment conservées. Mais elle offre un autre avantage et pas des moindres : n’ayant ni haut ni bas, elle ne met en avant aucune culture ou pays, contrairement aux projections classiques et relativement connues souvent centrées sur l’Occident. La projection de Fuller laisse également des libertés comme un découpage différent ou une orientation différente du fait de l’absence d’orientations cardinales.
Fuller
1954
Azimutale
x
La projection Authagraph
Enfin, la projection Authagraph inventée récemment par l’architecte Japonais Hajime Narukawa, se rapproche fortement de la projection de Fuller dans sa conception à la seule différence qu’elle utilise une surface sphérique de 96 faces au lieu de 20! Il en résulte une projection cartographique quasi-équivalente, c’est-à-dire une carte quasi-parfaite en terme de proportion relative.
Autagraph
1999
Azimutale
x
La classification des projections cartographiques
Il existe deux principales classifications des projections: la première en fonction de la nature de leurs altérations, et la seconde selon leur mode de construction.
Les projections selon leurs modes de construction
Par définition, la surface de projection est une surface sur laquelle on ‘‘déplie’’ le globe afin de ‘’mettre à plat’’. Seuls trois modes de projection sont présentés ici, les 3 principaux. Il faut savoir qu’il en existe d’autres, plus particuliers (elliptique, pseudo-cylindrique, sinusoïdal, etc.).
Les projections azimutales
La surface de projection est plane et tangente à la sphère projetée. Le centre de projection en bleu est le point tangent.
Les méridiens sont des droites concourantes. Les parallèles sont des cercles concentriques, équidistants ou non.
Les projections cylindriques
La surface de projection correspond à un cylindre tangent à la sphère projetée. Le centre de projection en bleu correspond à un cercle.
Les méridiens et les parallèles sont de droites perpendiculaires entre elles. Les parallèles sont équidistantes ou non.
La surface de projection est un cône. Le centre de projection en bleu est un cercle.
Les méridiens sont des droites concourantes. Les parallèles sont des cercles concentriques, équidistants ou non.
Les projections selon la nature des altérations géographiques
Les trois principales classes sont présentées ici. Il en existe d’autres plus particulières (équidistante par exemple).
Les projections équivalentes
Elles conservent les surfaces. Les altérations se portent sur les angles, et donc les continents au fur et à mesure que l’on s’éloigne du centre de projection.
Les projections conformes
Elles conservent les angles. Autrement dit, les parallèles et les méridiens se coupent à angle droit, exactement somme sur le globe non projeté. Les altérations se portent sur les distances et les surfaces au fur et à mesure que l’on s’éloigne du centre de projection.
Les projections aphylactiques ou quelconques
Elles ne conservent ni angles ni surfaces. Ces projections tentent au mieux de trouver un compromis entre les différentes altérations.
La nature des altérations peut être bien mise en évidence grâce aux indicatrices de Tissot. Elles consistent à retranscrire sur la projection les formes déformées d’une série de cercles qui sont identiques sur le globe non projeté.
Projection conforme
La forme des cercles n’est pas déformée, contrairement à leur superficie.
Projection équivalente
La superficie des cercles n’est pas déformée, contrairement à leur forme.
Projection aphylactique
La forme des cercles et leur superficie sont déformées.
En résumé
Les projections peuvent être classées soient par types d’altérations qu’elles engendrent, soit par leur mode de construction.
Il existe 3 classes principales de projections en termes d’altérations: conformes, équivalentes et aphylactiques.
Il existe 3 classes principales de mode de projection: cylindrique, azimutale et conique.
La projection la plus commune de nos jours est celle de Mercator, c’est une projection cylindrique conforme.
LEUR HISTOIRE
L’apparition du concept de Carte pendant la Préhistoire
Bien plus connue que ses célèbres peintures rupestres, la Grotte de Lascaux abrite aussi une partie du ciel nocturne sur ses parois datée de -16 500. Apparaissent notamment les 3 étoiles les plus brillantes et les Pléiades, un amas d’étoiles. S’il s’agit du ciel et non du monde environnant, c’est bien là une première forme de cartographie.
Toutefois, on considère que la toute première forme de carte du monde est un rocher gravé de plusieurs dizaines de mètres carrés en Italie. C’est la Carte de Bedolina dont la réalisation se situe à cheval entre la Préhistoire et l’Antiquité. Elles présente plusieurs données topographiques tels que des villages, champs, routes, etc. L’étendu du « monde » présenté sur cette carte est bien entendu très restreint, mais n’en reste pas moins une carte du monde connu environnant de l’époque.
La naissance d’un vrai savoir pendant l’Antiquité
Ptolémée et les grecs : représenter le monde de manière réaliste
Le monde grec est précurseur dans le domaine des cartes : Ptolémée, sans doute le plus connu des mathématiciens et astronomes, a beaucoup fait avancer la science de la cartographie, tout en s’aidant et s’inspirant des connaissances des savants qui l’ont précédé : Eratosthène, Marin de Tyr, Hipparque, Hécatée de Milet, etc.
En 150, il réalise son œuvre La Géographie, une compilation des connaissances du monde et de sa géographie. Le 8ème et dernier livre de cet ouvrage est ce que l’on pourrait appeler le premier atlas régional du monde antique composé de 27 cartes, la première étant une carte principale et générale de la Méditerranée accompagnée de plusieurs cartes secondaires plus localisées comportant plus de détails. Le 1er livre est théorique et présente les bases du sujet. Les six livres suivants, quant à eux, sont des recueils de coordonnées géographiques plus ou moins exactes d’innombrables lieux connus à l’époque (villes, montagnes, etc.).
La sphéricité de la Terre étant connue dans le monde antique grec, Ptolémée est le premier à introduire ce qu’on appelle la projection cartographique. Il crée le premier planisphère à l’aide d’une projection conique, mais qui malgré tout déforme significativement les territoires du fait de l’inexactitude des coordonnées de l’époque. Ses cartes régionales utilisent une projection cylindrique, inspirée de Marin de Tyr.
Si toutes les cartes de Ptolémée ont été perdues, ce n’est pas le cas de ses recueils de coordonnées ni celui de ses écrits théoriques du 1er livre de sa Géographie, ce qui a permis de redessiner facilement ses réalisations par la suite.
Carte de Ptolémée en projection conique redessinée postérieurement durant le Moyen-Âge.
Les romains : des cartes pour faciliter la circulation
Les romains avaient développé des cartes de toutes les routes et villes principales de l’empire romain, s’étendant de la Grande Bretagne à la Turquie actuelle, il s’agit là des ancêtres de la carte routière. Il n’en reste aujourd’hui qu’une copie datant du XIIIème siècle : La Table de Peutinger. La Table de Peutinger est un rouleau de 7m de long et de 34cm de large, sur lequel s’inscrit toute une série d’itinéraires indépendants les uns des autres et sans système particulier de coordonnées. Ainsi, pour les romains, la priorité des cartes était de se repérer et donc de circuler facilement dans leur vaste empire, et non une volonté de représenter le monde le plus fidèlement possible.
Morceau d’un fac-similé de 1887 (reproduction exacte) de la Table de Peutinger originale. On note l’absence évidente de réalisme et les routes en rouge bien voyantes qui sillonnaient l’Empire Romain.
Du Moyen-Âge jusqu’aux Grandes Découvertes et au-delà
Le monde arabe et la mappemonde Tabula Rogeriana
Pendant la période médiévale et à la différence de l’Occident, le monde arabe conserve intégralement les connaissances de Ptolémée, et y apporte de nombreuses améliorations. Le roi de Sicile Roger II fit travailler auprès de lui le géographe arabe Al-Idrissi, qui permit la naissance de la mappemonde Tabula Rogeriana en 1154, voulue réaliste. Cette Carte du Monde est orientée au sud et le nord est en bas, seule une partie de l’Afrique et du contient eurasien sont représentés, et ils sont accompagnés d’un texte explicitant les caractéristiques de chaque région délimitée : conditions culturelles, politiques et socio-économiques. Ces informations ont été recueillies durant 15 ans par Al-Idrissi auprès de voyageurs expérimentés et dans des livres qu’il avait à disposition.
Les Cartes en T ou Cartes TO
La géographie de Ptolémée principalement perdue en Europe occidentale, ce sont les Cartes en T (ou TO) qui sont majoritairement présentes au Moyen-Âge entre le VIIe et le XIIIe siècle. Elles se composent de 3 parties séparées par les lignes d’un T, au centre se trouve Jérusalem, considérée comme le centre du monde, et les 3 parties correspondent aux seuls continents connus à l’époque : l’Europe, l’Asie et l’Afrique. L’Asie est orientée au nord, l’Europe au sud-ouest et l’Afrique au sud-est. Le tout est encerclé par un O représentant l’océan, d’où le nom de cette Carte. On comprend qu’avec une représentation telle que celle-ci, extrêmement éloignée de la réalité, ces mappemondes n’étaient pas conçues pour se repérer ou se déplacer. Elles étaient surtout une représentation du monde reflétant les idées philosophiques et le contexte religieux de l’époque.
La Carte d’Ebstorf conçue au milieu du XIIe siècle, est la carte en T la plus complète connue à ce jour. La Carte de Hereford de 1290 en est un autre exemple connu.
Carte TO du VIIe siècle
Carte TO d’Ebstorf. Le T est moins mis en évidence, mais bien présent dans la partie basse droite, il est formé par la mer.
Le Portulan
Face au caractère théologique des cartes en T, et avec l’expérience pratique et grandissante des navigateurs, le Portulan fait son apparition au XIIIe siècle. Carte de navigation, elle est utilisée jusqu’au XVIIIe siècle. Elle est principalement conçue pour repérer les ports, les côtes, les îles, et tous les dangers qui s’y rattachent : courants, hauts-fonds, etc., et ainsi faciliter la navigation à l’époque. Elle se caractérise notamment par ses entrelacs de ligne de couleurs, qui pourraient s’apparenter à des ‘’toiles d’araignées’’, et qui sont construite à partir de 16 directions cardinales espacées de 11,25° appelées lignes de Rhumb. Il n’y a pas de coordonnées géographiques. Les continents en revanche restent souvent vierges ou sont richement décorés sans utilité aucune, ce qui fait des portulans des cartes exclusivement à usage marin.
Parmi les premiers portulans, on compte la Carte Pisane datée de 1290, celle du génois Petrus Vesconte vers 1310, ainsi que celle d’Angelino Dulcert en 1339. Un autre portulan datant de 1375 et considéré comme le chef-d’œuvre de la cartographie de ce siècle est l’Atlas Catalan. Réalisé par Abraham Cresques vers 1375, il renferme des caractéristiques liées à l’astrologie et la cosmographie, il comporte les trois continents connus à l’époque dont l’Asie, où apparaissent des éléments d’ordre mythologiques.
La Carte Pisane en 1290. On aperçoit tous les noms des ports qui font apparaître la forme des côtes, ainsi que les fameuses lignes de Rhumb en toile d’araignée. On distingue bien la forme caractéristique de la Méditerranée.
Beaucoup de ces cartes étaient considérées comme de l’art car elles reflétaient une connaissance approfondie des mers et étaient les témoins du pouvoir commercial et naval d’un royaume. En effet, si les premiers portulans représentaient principalement la région méditerranéenne et la Mer Noire, ils s’élargissent avec le temps à tout l’espace exploré par les navigateurs de l’époque.
Ce sont les portugais qui sont les premiers à développer une forte activité cartographique grâce aux portulans. La réalisation des premiers portulans des côtes africaines avec le portugais Vasco de Gama qui les contournent pour la première fois, sont d’autant plus nécessaires que les astres dans l’hémisphère sud ne sont plus les mêmes que ceux dans l’hémisphère nord. Le ciel nocturne était en effet l’un des moyens qu’utilisaient les explorateurs pour se diriger. La carte la plus précise de terres inconnues devient un trésor, et même un secret d’état pour les royaumes qui la possédait, notamment le Portugal.
La Géographie de Ptolémée retrouvée
Malgré ça, le secret est mal gardé et ces cartes aux informations précieuses se diffusent. L’imprimerie d’ailleurs, joue un grand rôle dans cette diffusion. Entre temps, La Géographie de Ptolémée, qui était bien connue dans la civilisation arabo-musulmane, arrive en Italie au XIVe et XVe siècle, puis très vite en France, où elle connait une large diffusion également. Ses cartes sont redessinées, ses textes sont traduits. La Géographie de Ptolémée devient l’un des livres les plus imprimés avec la Bible. Agrémentée de ses améliorations et extensions apportées depuis la date de sa création, elle devient la base de toutes les cartes jusqu’au XVIe siècle, simultanément avec le changement de vision du monde qu’apportent les Grandes Découvertes. Les coordonnées géographiques sont introduites. La technique du portulan et la géographie de Ptolémée se complètent et enrichissent la science de la cartographie.
Le ‘’quatrième continent’’, l’Amérique, devient connu avec l’avancée des Grandes Découvertes. Les premières cartes de ce continent émergent au début du XVIème siècle. Les cartes sont de plus en plus réalistes. Avec la possibilité de représenter le monde dans son intégralité, grandit la nécessité d’utiliser des projections cartographiques, d’où l’émergence de nombre d’entre elles. Cartographe devient alors synonyme de mathématicien au XVIe et XVIIe siècle. L’un des plus connu, Mercator, est à l’origine de la projection cartographique sans doute la plus massivement utilisée aujourd’hui. Il crée en 1569 une projection cylindrique conforme très avantageuse pour la navigation. La projection de Mercator obtient un succès immédiat, c’est la fin de la géographie de Ptolémée. Le fort développement de la cartographie donne naissance à des écoles spécialisées dans cette thématique.
La projection de Mercator originale de 1569. On retrouve les lignes de Rhumb qui caractérisent les portulans.
Les cartes sont désormais débarrassées de toutes références religieuses ou mythiques fortement présentes à l’époque médiévale.
Les atlas, recueils de cartes, prennent leur essor au XVIe siècle. Très décorés, illustrés et luxueux, ils ne sont accessibles qu’aux très fortunés. Posséder un atlas était un signe de distinction et de reconnaissance sociales. Au XVIIe siècle, des cartes soignées deviennent de objets d’art et sont exposées comme des tableaux.
L’histoire du monde et de ses frontières (chaque année) en vidéo
LES NAVIGATEURS
Une brève chronologie de l’exploration terrestre
► Préhistoire
Les débuts de la navigation se situent durant la Préhistoire.
► Antiquité
Les premier récits d’exploration attribués entre autre à Hannon et Phythéas, datent de l’Antiquité.
► Moyen-Âge
Au Moyen-Âge, les scandinaves explorent à l’Ouest (Groenland et Labrador actuels). Marco Polo quant à lui part à l’est en Asie centrale et s’engage sur la Route de la Soie.
► XVe siècle
Les Grandes explorations commencent avec l’exploration chinoise de Zheng He, et européennes de Vasco de Gama, Christophe Colomb, Magellan, Jacques Cartier, Samuel de Champlain, Cook, Lapérouse, etc.
► Fin du second millénaire
Durant les derniers siècles de notre millénaire, l’Afrique est explorée par Speke, et plus tard, c’est au tour des deux pôles du globe : Peary part au Pôle Nord, Amundsen part au Pôle Sud.
► Fin
Ces dernières expéditions marquent la fin des explorations terrestres.
Comment les marins naviguaient-ils ?
Naviguer demandait de connaitre trois données importantes :
La Vitesse
Le Cap
La Position
Avant le XIIème siècle, les marins utilisaient simplement les étoiles et le soleil sans instruments, ou encore le vent lorsque la météo ne permettait pas l’observation des astres. Ensuite est apparu le compas magnétique ou boussole en Occident, ce qui a inclus la nécessite d’utiliser des Cartes lors des voyages. Au XVe siècle, avec l’envie grandissante d’explorer plus loin et l’allongement significatif de la durée des voyages, émergent des techniques précises reposant sur l’astronomie.
La Vitesse
La vitesse, elle, était estimée avec les moyens du bord (littéralement parlant, puisque cette expression tire son origine du monde de la marine) : les marins calculaient le temps que mettait le navire à dépasser un objet jeté depuis la proue. La vitesse était alors très simple a calculer, mais les résultats étaient plutôt imprécis.
Vitesse =
longueur du bateau / temps mesuré
Une autre méthode, plus précise, consistait à jeter par-dessus bord une corde reliée au navire, et comportant des nœuds espacés de manière régulière, au bout de laquelle est attachée une planche. Le navire, avance, la corde se déroule, le temps passe, il suffit de compter le nombre de nœuds déroulés au bout d’un certain temps donné, et les navigateurs avaient accès à leur vitesse, exprimée en nœuds marins ou en milles marins par heure (unité encore actuelle). Ce système qui se développe en outil au XVe siècle porte un nom : le loch à bateau.
Vitesse =
nombre du nœuds / temps mesuré
Avec le temps, des lochs automatisés font leur apparition : les loches à hélice, les lochs à tubes de Pitot plus récemment, etc.
Le Cap
Le cap, quant à lui est une donnée très importante, surtout avec la venue des grandes explorations. Il s’agit de pouvoir orienter son navire, mais également d’être capable de corriger les déviations de trajectoire dues aux vents et aux courants, et ainsi éviter que le navire dérive.
L’observation du ciel
L’est et l’ouest étaient déterminés avec le lever et le coucher du soleil.
Le nord et le sud étaient repérés à l’aide l’étoile Polaire visible dans l’hémisphère nord, bien connue aujourd’hui, et qui s’alignait et s’aligne toujours avec le Pôle Nord. La direction opposée indiquait donc le Pôle Sud. Il existe une constellation visible dans l’hémisphère sud, la Croix du Sud, dont le rôle est équivalent à l’étoile Polaire dans l’hémisphère nord : elle s’aligne avec le Pôle Sud.
Les navigateurs pouvaient aussi suivre une étoile dont ils savaient qu’elle allait se coucher à telle direction à l’horizon, qui correspondait à leur cap qu’ils corrigeaient en lisant l’alignement des étoiles. De telles méthodes exigeaient évidemment une très bonne connaissance de la cartographie du ciel et des astres. Il y a plus de 1500 ans, les Polynésiens utilisaient déjà ces techniques sans instruments reposant sur les astres, et ont fait de très longs voyages de plusieurs milliers de kilomètres.
La Navigation à Vue
Avant l’introduction de la boussole au XIIe siècle, et donc avant la période des Grandes Découvertes, les zones de navigation restaient très restreintes. Les marins pouvaient alors se contenter de naviguer ‘’à vue’’, ce qui consistait à se repérer principalement grâce aux objets extérieurs et aux amers. Ces derniers sont des repères visuels facilement identifiables tels qu’un clocher, un arbre remarquable, un phare, etc. L’observation des astres pouvait venir compléter cette technique lorsque le manque de repères se faisait sentir et que les marins s’éloignaient des côtes. C’est d’ailleurs en navigant à vue que les premiers explorateurs portugais ont longé les côtes africaines à l’aide des portulans, et ont pu être les premiers à développer ce type de cartes.
La Navigation à l’Estime avec le Compas Magnétique ou Boussole
Avec l’introduction de la boussole, les marins ont pu commencer à naviguer ‘’à l’estime’’. La navigation à l’estime consiste à déduire sa position actuelle par rapport à sa dernière position connue, sa route et la distance parcourue. Elle suppose donc le tracé de ses propres trajectoires sur une Carte. L’apparition de la boussole se couple alors avec la forte utilisation des portulans. Chaque jour donc, le navigateur calculait les corrections de cap et effectuait ses tracés sur ses cartes.
Apparu au XVe siècle et utilisé jusqu’au XIXe siècle, le renard était un instrument pratique et simple d’utilisation pour les matelots qui étaient souvent illettrés à l’époque. C’est une planche faite de trous correspondants chacun à l’une des 16 directions cardinales conventionnelles. Chaque demi-heure (mesurées à l’aide d’un sablier), le matelot responsable du renard, venait planter une cheville dans le trou correspondant à la direction du navire. Ainsi, le navigateur pouvait réévaluer son cap avec ces informations qu’il relevait régulièrement. La vitesse pouvait aussi être relevée toutes les demi-heures sur le renard.
Aujourd’hui, avec les systèmes de navigation par satellite, le renard est obsolète, mais toujours présent sur les navires, et même obligatoire dans la marine professionnelle, dans le cas éventuel d’une défaillance des systèmes satellites.
Naviguer en fonction des vents
Contenu à venir.
La Position
La Navigation Astronomique
Au XVe siècle, les européens se lancent plus loin dans l’océan en s’éloignant significativement des côtes, ce qui ne rend plus possible la navigation à vue. La navigation astronomique prend alors toute son utilité, et vient compléter la navigation à l’estime. Alors que la longitude reste une donnée difficilement calculable, une méthode est développée pour calculer la latitude : la hauteur de la polaire.
La hauteur de la polaire
L’étoile Polaire étant alignée dans l’axe de la Terre et dans la direction du pôle nord, on en déduit que plus elle apparait haute dans le ciel, plus on se trouve vers le pôle, et plus la latitude est grande, et vice versa. En mesurant la hauteur de l’étoile polaire, soit son angle avec l’horizon, on peut alors déterminer sa propre latitude.
La hauteur de la polaire au Pôle Nord
La hauteur de la polaire à une latitude de 45°
La hauteur de la polaire à l’équateur
Cette mesure s’effectuait à l’aube et au crépuscule car il était nécessaire que l’horizon soit visible. D’abord à mesurée à l’œil nu, les résultats étaient assez approximatifs. Elle fut mesurée ensuite à l’aide d’instruments qui ont été développés comme l’astrolabe. Instrument inventé par les arabes dans l’Antiquité, il repose sur une projection plane de la voûte céleste. Puis, la hauteur de la polaire fut mesurée avec un sextant, plus précis que l’astrolabe et utilisé quel que soit l’hémisphère dans lequel on se situe. Le sextant est encore utilisé aujourd’hui.
Le chronomètre de marine
La longitude quant à elle, pose beaucoup plus de problème car elle est beaucoup plus difficile à mesurer. Elle requiert la connaissance de l’heure durant un long voyage, ce qui nécessitait une horloge. C’est au XVIIIe siècle que le problème est résolu : le chronomètre à longitude de marine.
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