L’univers des cartes du monde
On se souvient sans doute des cartes de notre enfance en papier, pédagogiques et colorées, avec lesquelles nous découvrions la géographie, les pays et leurs capitales.
Aujourd’hui, la carte du monde conserve le même pouvoir et même plus, elle est universelle : nous orienter, décorer nos murs, rêver et voyager, évoquer des souvenirs, nourrir la curiosité et inspirer l’évasion.
Reconnaissable entre toutes par la silhouette de ses continents, elle parle à chacun, quel que soit son pays, son histoire ou ses rêves. Qui ne situe pas son pays, sa ville ou le trajet de ses anciens voyages devant un Planisphère ? Qui ne rêve pas d’aller ici ou là lorsqu’on pose les yeux sur une Mappemonde ?
Derrière cette image familière se cache un riche passé. Nous vous proposons de découvrir cette histoire, faite d’innovations, d’évolutions et de renaissances au fil des siècles.
La Mappemonde
Même si le terme Mappemonde ou Mappa Mundi est maintenant couramment utilisé pour désigner toute carte du monde, il désignait à l’origine les cartes du monde imaginé plat, réalisées en Europe durant le Moyen-Âge.
Toutes les véritables Mappemondes que l’on possède actuellement représentent une vision du monde archaïque, avec des distances souvent fausses ou imprécises. Aujourd’hui, 1 100 mappa mundi nous viennent du Moyen-Âge.
La Rose des Vents
Les premières Roses des Vents n’indiquaient pas 4 directions, mais 8 ou même 16 parfois ! À l’époque des grandes explorations, elles se sont complexifiées, allant jusqu’à 32 directions pour plus de précision.
Les Roses des Vents au Moyen-Âge indiquaient l’est en haut afin de pouvoir placer Jérusalem, la ville sainte, à un niveau supérieur. Le nord en n’est devenu une norme qu’à partir du XVIIᵉ siècle !
Les projections
Leur histoire
Les navigateurs
Un peu de vocabulaire
Le Globe Terrestre
L’un des premiers Globes connus apparait dans l’Antiquité vers 150 avant J.-C., illustrant les terres alors imaginées. Le plus ancien encore conservé date de 1492.
Aux XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles, les Globes deviennent des symboles de prestige, trônant dans les bibliothèques des érudits et des princes.
Le Planisphère
D’autant que notre planète n’est pas parfaitement sphérique, mais plutôt une ellipsoïde.
Par définition, un Planisphère est donc inexact, et chaque type de carte naît avec le souci de se rapprocher le plus fidèlement possible de la géographie complexe de notre planète.
La projection cartographique
Mais passons les mathématiques ! Penchons-nous plutôt sur les différentes projections cartographiques qui ont jalonnées l’histoire de la Carte du Monde.
Les projections, des plus classiques aux plus extravagantes
Les projections de Mercator, Gall Peters et Mollweide
Il existe plusieurs variantes de la projection de Mercator, les différences se portent sur l’espacement des parallèles. En réalité, même si le nom de Mercator est couramment utilisé et est sans doute le nom de projection le plus connu, les Cartes du Monde les plus vues de nos jours correspondent plutôt à ses fameuses variantes : on peut citer la projection de Marin de Tyr, la projection de Gall, et la projection de Miller, par exemple. Elles possèdent la même caractéristique qui est de défomer les surperficies relatives, mais ont le mérite de de les minimiser.
C’est pour remédier à ses déformations que James Gall, suivi de Arno Peters, proposèrent leur propre projection qui conserve les superficies relatives : la projection de Gall-Peters. Il s’agit d’un compromis puisqu’à l’inverse, elle ne préserve pas les angles ce qui rend les continents difformes et par conséquent moins esthétiques.
La projection de Mollweide aussi appelée projection de Babinet, quant à elle, est une autre façon de conserver les surfaces relatives, mais toujours au détriment des angles. Cette projection assez connue est fréquemment utilisée pour les planisphères en raison de son caractère compact.
La projection de Goode
La projection de Postel
Emblème de l’ONU
Projection de Postel
La projection de Cassini
La projection d’Albers
Les projections de Bonne, Sanson Flamsteed et Werner
- La projection de Sanson-Flamsteed : la parallèle d’origine est l’équateur.
- La projection de Werner : la parallèle d’origine est un pôle.
La projection de Fuller
La projection AuthaGraph
La projection AuthaGraph inventée récemment par l’architecte Japonais Hajime Narukawa, se rapproche fortement de la projection de Fuller dans sa conception à la seule différence qu’elle utilise une surface sphérique de 96 faces au lieu de 20 ! Il en résulte une projection cartographique quasi-équivalente, c’est-à-dire une carte quasi-parfaite en terme de proportion relative.
La projection Equal Earth
Enfin, la projection Equal Earth, créée en 2018 par Tom Patterson, Bojan Šavrič et Bernhard Jenny, est une projection cartographique équivalente conçue pour représenter fidèlement les surfaces terrestres. Inspirée de la projection Winkel Tripel, elle conserve une apparence harmonieuse du globe tout en respectant les proportions réelles des continents. Son tracé doux et équilibré offre une vision plus juste et plus esthétique du monde, conciliant précision géographique et beauté visuelle.
La classification des projections cartographiques
Mode de construction
Les projections azimutales
Résultat : Les méridiens sont des droites concourantes. Les parallèles sont des cercles concentriques, équidistants ou non.
Les projections cylindriques
Résultat : Les méridiens et les parallèles sont de droites perpendiculaires entre elles. Les parallèles sont équidistantes ou non.
Les projections coniques
Résultat : Les méridiens sont des droites concourantes. Les parallèles sont des cercles concentriques, équidistants ou non.
Altérations géographiques
Les projections équivalentes
Résultat : La superficie des indicatrices de tissot n’est pas déformée, contrairement à leur forme.
Les projections conformes
Résultat : La forme des indicatrices de Tissot n’est pas déformée, contrairement à leur superficie.
Les projections aphylactiques ou quelconques
Résultat : La forme et la superficie des indicatrices de Tissot sont déformées.
En résumé
Mercator
1569
1580
1745
1780
1805
1805
1855
1923
1954
1999
2018
Équivalente
L’apparition du concept de Carte pendant la Préhistoire
Toutefois, on considère que la toute première forme de carte du monde est un rocher gravé de plusieurs dizaines de mètres carrés en Italie. C’est la Carte de Bedolina dont la réalisation se situe à cheval entre la Préhistoire et l’Antiquité. Elles présente plusieurs données topographiques tels que des villages, champs, routes, etc. L’étendu du « monde » présenté sur cette carte est bien entendu très restreint, mais n’en reste pas moins une carte du monde connu environnant de l’époque.
La naissance d’un vrai savoir pendant l’Antiquité
Ptolémée et les grecs : représenter le monde de manière réaliste
En 150, il réalise son œuvre La Géographie, une compilation des connaissances du monde et de sa géographie. Le 8ème et dernier livre de cet ouvrage est ce que l’on pourrait appeler le premier atlas régional du monde antique composé de 27 cartes, la première étant une carte principale et générale de la Méditerranée accompagnée de plusieurs cartes secondaires plus localisées comportant plus de détails. Le 1er livre est théorique et présente les bases du sujet. Les six livres suivants, quant à eux, sont des recueils de coordonnées géographiques plus ou moins exactes d’innombrables lieux connus à l’époque (villes, montagnes, etc.).
La sphéricité de la Terre étant connue dans le monde antique grec, Ptolémée est le premier à introduire ce qu’on appelle la projection cartographique. Il crée le premier planisphère à l’aide d’une projection conique, mais qui malgré tout déforme significativement les territoires du fait de l’inexactitude des coordonnées de l’époque. Ses cartes régionales utilisent une projection cylindrique, inspirée de Marin de Tyr.
Si toutes les cartes de Ptolémée ont été perdues, ce n’est pas le cas de ses recueils de coordonnées ni celui de ses écrits théoriques du 1er livre de sa Géographie, ce qui a permis de redessiner facilement ses réalisations par la suite.
Les romains : des cartes pour faciliter la circulation
Du Moyen Âge jusqu’aux Grandes Découvertes et au delà
Le monde arabe et la mappemonde Tabula Rogeriana
Les Cartes en T ou Cartes TO
La Carte d’Ebstorf conçue au milieu du XIIe siècle, est la carte en T la plus complète connue à ce jour. La Carte de Hereford de 1290 en est un autre exemple connu.
Le Portulan
Parmi les premiers portulans, on compte la Carte Pisane datée de 1290, celle du génois Petrus Vesconte vers 1310, ainsi que celle d’Angelino Dulcert en 1339. Un autre portulan datant de 1375 et considéré comme le chef-d’œuvre de la cartographie de ce siècle est l’Atlas Catalan. Réalisé par Abraham Cresques vers 1375, il renferme des caractéristiques liées à l’astrologie et la cosmographie, il comporte les trois continents connus à l’époque dont l’Asie, où apparaissent des éléments d’ordre mythologiques.
Ce sont les portugais qui sont les premiers à développer une forte activité cartographique grâce aux portulans. La réalisation des premiers portulans des côtes africaines avec le portugais Vasco de Gama qui les contournent pour la première fois, sont d’autant plus nécessaires que les astres dans l’hémisphère sud ne sont plus les mêmes que ceux dans l’hémisphère nord. Le ciel nocturne était en effet l’un des moyens qu’utilisaient les explorateurs pour se diriger. La carte la plus précise de terres inconnues devient un trésor, et même un secret d’état pour les royaumes qui la possédait, notamment le Portugal.
La Géographie de Ptolémée retrouvée
Le ‘’quatrième continent’’, l’Amérique, devient connu avec l’avancée des Grandes Découvertes. Les premières cartes de ce continent émergent au début du XVIème siècle. Les cartes sont de plus en plus réalistes. Avec la possibilité de représenter le monde dans son intégralité, grandit la nécessité d’utiliser des projections cartographiques, d’où l’émergence de nombre d’entre elles. Cartographe devient alors synonyme de mathématicien au XVIe et XVIIe siècle. L’un des plus connu, Mercator, est à l’origine de la projection cartographique sans doute la plus massivement utilisée aujourd’hui. Il crée en 1569 une projection cylindrique conforme très avantageuse pour la navigation. La projection de Mercator obtient un succès immédiat, c’est la fin de la géographie de Ptolémée. Le fort développement de la cartographie donne naissance à des écoles spécialisées dans cette thématique.
Les atlas, recueils de cartes, prennent leur essor au XVIe siècle. Très décorés, illustrés et luxueux, ils ne sont accessibles qu’aux très fortunés. Posséder un atlas était un signe de distinction et de reconnaissance sociales. Au XVIIe siècle, des cartes soignées deviennent de objets d’art et sont exposées comme des tableaux.
Les siècles passent, la découverte de terres inconnues touche petit à petit à sa fin, l’évolution de la Carte du Monde ralenti, tout en continuant à se perfectionner dans ses détails. Les projections cartographiques continuent à voir le jour au fil du temps, essayant toujours au maximum de restituer le monde avec le moins de déformations possible.




